1923 – Enigma, machine de cryptographie électromécanique

Histoire d’Enigma, célèbre machine portable de cryptographie

Enigma est une machine de cryptographie. Malgré son apparence de machine à écrire, elle a non seulement joué un rôle déterminant lors de la Seconde Guerre mondiale mais elle a aussi fait considérablement avancer l’histoire de l’informatique et de l’Intelligence Artificielle.

Cette machine est d’abord commercialisée en Europe au début des années 1920. D’origine allemande, elle a été inventée par Arthur Scherbius, à des fins commerciales. Objectif, protéger les échanges d’informations entre banques grâce à un cryptage considéré à l’époque comme indéchiffrable. A partir de 1923, de nombreuses déclinaisons de cette machine seront commercialisées en Europe et dans le monde. Le nom « Enigma » sera alors employé de façon générique, pour désigner cette famille de machines. Ainsi, avant de devenir, grâce à Turing, un symbole du décryptage entre les mains des Alliés pendant la guerre, Enigma était surtout un outil efficace permettant de sécuriser les communications.

Comment fonctionne une Enigma ?

Chaque message est codé lettre à lettre : chaque lettre est entrée via le clavier avant de s’afficher sur un tableau lumineux. Pour brouiller les messages, Enigma se sert de rotors montés sur des cylindres, traversés par des courants électriques. Ce sont eux qui servent à coder le message : pour chaque lettre tapée, les rotors tournent, changeant la configuration du réseau. A chaque extrémité de la transmission, l’utilisateur dispose de différents jeux de rotors. Leur choix et l’ordre dans lequel ils sont placés peuvent être changés pour renforcer la solidité du cryptage. Sans connaitre la clé avec laquelle il a été crypté, casser les codes produits de cette façon supposait de venir à bout d’un nombre astronomique de combinaisons possibles.

Entre les deux guerres, la réputation d’invincibilité de l’Enigma avait découragé la plupart des cryptologues de se frotter à elle. Mis à part le bureau du Chiffre Polonais et un jeune mathématicien, Marian Rejewski, qui décida de s’attaquer au décryptage de cette machine. Son acharnement lui permis d’avancer sur le codage des messages. Mais fin 1938, les Allemands décidèrent de muscler la sécurité d’Enigma. Ils firent passer le nombre de rotors de trois à cinq rendant les travaux de Rejewski quasi inopérants.

Le rôle d’Enigma pendant la Seconde Guerre mondiale

Si la Première Guerre mondiale avait été une guerre de positions (avancées lentes sur des champs de batailles se faisant face), la Seconde guerre mondiale va se faire « en mouvement ». En 14-18, la communication des armées se faisait par messagers à cheval et par pigeons voyageurs ou encore par transmission de télégrammes cryptés à la main, avec un codage assez rudimentaire. Mais dès 1933, l’armée allemande fait évoluer sa stratégie militaire. Elle se dote d’une force de frappe importante avec des armements plus mobiles (tanks, blindés, bombardiers…). L’efficacité de cette stratégie repose alors sur la rapidité des attaques sur les positions ennemies, et sur la coordination des armées entre elles.

C’est ainsi que les machines Enigma, renforcées par les cryptologues allemands pour ces nouveaux usages, vont devenir un atout essentiel de la sécurisation des communications militaires. En effet, ces machines multiplient les points forts : elles sont rapides, plus simples à utiliser que d’autres procédés de cryptage grâce à leur dispositif électromécanique automatique. De plus, leur petite taille leur permet d’être facilement transportées sans entraver la mobilité des forces armées sur laquelle repose la nouvelle stratégie des forces allemandes. Elles étaient quelque 30 000 au début de la guerre et on les estime au nombre 200 000 à la fin de la guerre.

La contribution d’Alan Turing au décryptage d’Enigma

Les cryptanalystes travaillaient habituellement sur le décryptage des clés de chiffrement. Mais Alan Turing préfère une technique élaborée à partir des mathématiques. Il se base sur la connaissance du fonctionnement interne d’Enigma et s’appuie sur une nouvelle technique de décryptage appelée le « mot probable » après avoir remarqué que l’on pouvait souvent anticiper au moins quelques mots d’un message. Il repart des travaux de Rejewski pour rédiger la première spécification fonctionnelle de sa « bombe », autrement dit une machine électromécanique, capable d’effectuer le travail quotidien de 10.000 personnes pour venir à bout des messages cryptés.

Turing perce notamment les secrets de la clé de cryptage de l’Enigma M4, plus sophistiquée encore, utilisée par la Kriegsmarine. Ce réseau, le plus difficile à infiltrer, représentait une menace permanente pour les Alliés. Pour réaliser ses travaux, Turing se rapproche de Joan Clarke, une des femmes cryptologues à Bletchley Park.

Bande annonce du film « Imitation game » qui retrace une partie de la vie d’Alan Turing, la période (1939) où le mathématicien et cryptologue s’attaque au décryptage d’Enigma, notamment avec Joan Clarke à Bletchley Park.

Une machine Enigma repêchée au fond de la mer

 

Le 11 novembre 2020, des archéologues sous-marins ont fait une pêche miraculeuse pour l’Histoire. Dans le cadre d’une opération du WWF pour débarrasser la mer Baltique de filets de pêche abandonnés tuant de nombreux mammifères marins, c’est une machine Enigma qui a été remontée.

Si cette machine se trouvait au fond de la mer, c’est parce que les autorités allemandes avaient ordonné la destruction des machines Enigma pour que les alliés ne puissent les récupérer. De même que Churchill qui voulait tenir secrets les apprentissages réalisés par les équipes britanniques de décryptage de ces machines. Compte tenu de l’endroit où s’est produite cette pêche miraculeuse, le fond de la baie de Gelting, ce serait une Enigma de type M3 qui était utilisée entre 1935 et 1945 par la marine de guerre allemande, plus particulièrement ici dans le cadre de l’opération Regenbogen destinée à intercepter un convoi britannique de ravitaillement de l’URSS.

Cette Enigma sauvée des eaux a été confiée au musée d’archéologie du Schleswig, dans le nord de l’Allemagne, qui va en effectuer la restauration.

 Le regard de cKiou

– Hi, cKiou est bluffée par l’histoire d’Enigma. Cette « machine électromécanique de cryptographie » a beau ressembler à une simple machine à écrire, la place qu’elle a prise dans la destinée du monde est étonnante. De plus, elle porte bien son nom, c’est une énigme pour des habitants du XXIè siècle ! Elle fait partie de ces « objets » qui ne révèlent vraiment pas leur fonction au premier regard !
On peut aussi se demander si Alan Turing aurait eu le même destin s’il n’avait pas été appelé à se confronter à cette machine.

Quant à cette Enigma miraculeusement sauvée des eaux, cKiou espère que sa restauration livrera de nouveaux secrets historiques !

Décidément, cKiou adore découvrir l’Histoire des technologies qui ont petit à petit conduit à sa naissance !

Et pour ne pas manquer la suite de l’Histoire du numérique…

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